Dans l’univers douillet d’Ingrid St-Pierre

Article par Karianne Falcon 
Photos par Martine Boucher

Jeudi soir dernier, Ingrid St-Pierre ouvrait les portes du Cabaret Latulipe à parents, amis et médias à l’occasion du lancement de son troisième album en carrière, intitulé Tokyo. Avec trois opus parus en quatre ans, Ma petite mam’zelle de chemin (2011) et Escapade (2012), et nouvellement maman, la chanteuse de 30 ans a une vie bien remplie. « Ça a été la plus grande année de ma vie», a-t-elle confié.


Comme elle le mentionnait sur scène, c’est grâce à son entourage en or, spécialement sa mère, son conjoint et musicien, Liu-Kong Ha, et le réalisateur de l’album, Philippe Brault, qu’elle était de retour au boulot deux semaines après son accouchement pour enregistrer le savoureux matériel qui se retrouve sur Tokyo. Malgré son jeune âge, l’auteure-compositeure-interprète a tout d’une artiste dévouée et d’une femme accomplie.


Plongée dans l’ambiance intime et tamisée de la salle de spectacle, l’interprète de Ficelles, pièce qui figure sur l’album Ma petite mam’zelle de chemin et qui a été reprise par la candidate Élisabeth Léger lors des directs de la Voix III, le temps de sa courte prestation, a dévoilé les pages d’un récit envoûtant qui transporte les esprits libres dans des destinations volages, frivoles, légères, mais qui sonnent véritablement comme du bonbon aux oreilles. Sur scène, Ingrid arborait un look simple et épuré, en contiguïté avec sa poche d’album aux couleurs pastel qui apporte un vent de fraîcheur, et à l’image des chansons authentiques et sensibles qui composent son plus récent album.


Assise derrière son piano, elle a lancé la soirée avec le morceau Tokyo Jellybean, accompagnée à la harpe, au trombone et à la basse qui, par ses sonorités dynamiques, venait apporter une petite touche de gaieté à la pièce en plus d’en accentuer le tempo. Une belle amorce en harmonie et en nuances! Celle qui a connu une année 2015 chargée de grandes émotions a ensuite enchaîné avec la pièce Place Royale, qui traite des vertus et des petits bonheurs de l’amour, et qui éveille à tout coup la fibre émotionnelle en chaque amoureux ou amoureux de l’amour. Quoi qu’avec des textes aussi bien fignolés et des accords mélodieux, il est difficile de ne pas tomber sur le charme. Après avoir initié son public à l’amour frais et pur, la jeune artiste à la voix perlée, sur laquelle on se laisserait bercer pendant des heures, a chanté l’amour au fil du temps, à travers la sagesse, la vieillesse et le deuil avec le titre 23 rue Leman qui, simplement à l’écoute des harmonies, évoque à la perfection  la nostalgie d’un aîné qui entame un nouveau chapitre ( peut-être le dernier) de sa vie; qui se repasse le film de ses belles années. La fragilité ressentie vient placer le spectateur aux premières loges de l’histoire, comme si lui-même la vivait. Un  moment de tendre douceur, malgré la tristesse des mots.


Poursuivant sur cette veine de la tristesse et du chagrin, mais sur des tonalités beaucoup plus percutantes que celles entendues jusque-là, rappelant les bruits saccadés des fanfares et des parades militaires, Ingrid a interprété la pièce Monoplace, inspirée de la grossesse qu’elle n’a pas rendue à terme, quelque temps avant de donner naissance à Polo, en septembre dernier. À travers les paroles est véhiculé le désir d’avoir voulu voir cet enfant s’accrocher : « J’aurais voulu que tu restes un peu»... « J’aurais voulu être ta maison, il n’y a pas de requiem assez grand...» Ce sont là des mots poignants et véridiques à un point tel qu’ils aideront les femmes ayant perdu des enfants à se sentir moins seules, mieux comprises et plus légères. La justesse des mots deviendra pour elles comme une plaie sur leurs blessures.


Pour la dernière chanson de la prestation, celle dont les inspirations musicales font quelque peu penser à Cœur de Pirate a délaissé le piano pour offrir une performance à la voix seulement avec le morceau L’éloge des dernières fois, qui relate les désirs inespérés et les regrets de relations amoureuses déchues. Une autre chanson remplie d’humilité et de véracité à laquelle chacun peut facilement s’identifier. Et que dire de la voix toute délicate d’Ingrid qui fait sembler à la voix d’une poupée de porcelaine fragile. Authenticité, délicatesse, douceur, fragilité, légèreté et sensibilité sont les mots d’ordre de ce troisième album.


L’auteure-compositeure-interprète a tenu à remercier ses fidèles complices de scène avec qui elle fait un travail exceptionnel : Mathieu Daisy (basse et contre-basse), son conjoint Liu-Kong Ha (percussions), Benoît Rocheleau (clavier et basse) et Éveylne Rousseau (voix et harpe). Sans oublier sa gérante Isabelle Vivier qui l’a prise sous son aile et l’a aidée à percer dans le milieu de la chanson.


Malgré qu’Ingrid ne nous emmène pas en terre inconnue avec l’opus Tokyo, dont les influences sont très similaires à ses deux albums précédents, ses chansons sont réconfortantes, si bien qu’on voudrait se blottir dans les couvertures chaudes de notre lit pour  passer la journée à les écouter dans le calme et la quiétude. Un petit plus à mettre sur sa liste d’achats avec l’hiver froid qui est à nos portes!


Vous pouvez dès maintenant vous procurer l’album Tokyo d’Ingrid St-Pierre sur Itunes 


Dès la fin du mois de janvier, Ingrid St-Pierre sera en tournée à travers le Québec. En attendant, vous pouvez commencer à apprendre ses chansons pour les savoir par cœur lorsqu’elle s’arrêtera dans votre région.  Allez aussi écouter la pièce  La Ballerine qu’Ingrid a écrite et composée pour Brigitte Boisjoli, et qui figure sur l’album Sans regret de cette dernière, sorti l’année dernière.



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